Article paru dans  l'Est Républicain le 10 septembre 2004 en page Vosges

Jean-Christophe Capdet : « la possibilité de reprise existe, ne l’oublions pas ».

Matussière : la vie au jour le jour

Dans un mois maximum, les salariés de la papeterie de Rambervillers seront fixés sur leur sort. La détermination des uns et des autres ne faiblit pas. Visite sur le site.

La neige, la pluie, le vent, mais aussi le soleil sont passés par là ! Couvert de rouille, le barbecue installé devant la porte principale ne sert plus. Les énormes rouleaux de papier ont pris l'eau, les palettes de bois ont subi les mêmes assauts, l'herbe dévore le goudron de la cour... Vu de l'extérieur, et alors que depuis longtemps les machines se sont tues, on a le sentiment que l'entreprise Matussière et Forest est morte et enterrée.

Simple vue de l'esprit ! En pénétrant sur le site, on s'aperçoit très vite qu'il y a de la vie. Pas comme celle qui animait les lieux avant ce triste 5 janvier 2004, mais les gens qui sont là ne font pas semblant de se « battre ». Ils n'occupent pas l'usine pour le seul plaisir de faire une action. Derrière Jean-Christophe Capdet, le représentant Cgt des salariés, et les autres délégués syndicaux la vie s'est organisée. Pas pour tenir un siège, mais bel et bien pour montrer que les uns et les autres sont poussés par une détermination sans borne.

Après neuf mois d'attente, d'incertitude, ils sont toujours là, fidèles au poste, et ils ne sont pas à la veille de bouger. « Ce n'est pas maintenant qu'on va lâcher » raconte pour la énième fois Jean-Christophe Capdet. « On restera là tant qu'on n'aura pas de réponse concrète. Le repreneur existe, c'est qu'il y a une solution. On doit donc aller au bout. Ça fait 250 jours qu'on est là, alors... ». Alors, un de plus ou un de moins, ça ne changera plus grand chose. Seule l'issue est capitale.

Nouvelle offre de Lenk

Justement, et d'après une source extérieure, il semblerait que dans moins d'un mois, chacun devrait être fixé sur son sort. Pour l'heure, une chose est sûre : le possible repreneur, en l'occurrence l'industriel allemand Lenk a fait parvenir une nouvelle offre aux administrateurs, MM. Barbey et Coquet. Charge à eux de l'étudier et de transmettre leurs conclusions au tribunal de commerce de Grenoble.

« Ils ne devraient pas rendre leur réponse avant la semaine prochaine » précise-t-on du côté du Capev (Comité d'aménagement, de promotion et d'expansion des Vosges). Voilà qui ouvre peut-être une nouvelle porte.

Autant d'infos qui mettront du baume au coeur des salariés vosgiens, étant entendu que le plan de reprise prévoit l'embauche de 104 personnes. Or, au 9 septembre, 18 « anciens Matussière » ont retrouvé un job en contrat à durée indéterminée. 26 sont en CDD ou travaillent en intérim. La fracture n'est pas mince !

« On est vigilants sur tout »

Pour autant, personne ne baisse les bras. A l'intérieur, comme à l'extérieure de l'entreprise. « On est très soutenu, et surtout bien conseillé » explique Jean-Christophe Capdet. « C'est peut-être aussi parce qu'on a toujours fait les choses dans les règles. Mercredi encore, on a passé un accord avec la municipalité de Rambervillers et les organisateurs du Tour de l'Avenir cycliste (ndlr : notre édition précédente), et on l'a respecté. Eux aussi d'ailleurs. Il reste qu'on est vigilant, sur tout. Par exemple, le jour, comme la nuit, on surveille les entrées et les sorties des camions. Qui ne doivent transporter que des produits finis. Au début du conflit, il en restait 3.000 tonnes, aujourd'hui, ça doit approcher les 600 tonnes. En revanche pas question que quelqu'un de Matussière vienne toucher au matériel. Là, on se mobiliserait très vite. Et, on serait nombreux ».

Pas de menace dans la voix de Jean-Christophe Capdet, encore moins de chantage. « Pour le moment, on nous écoute, c'est important ». Il n'empêche que pour ceux qui ont reçu leur dernier bulletin de paye avec le « solde de tous comptes » à la fin juillet, le temps va vite devenir long.

Claude GIRARDET

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