Article paru dans l'Est Républicain en page Vosges le 6 mail 2004

Le président du Sénat au côté des repreneurs : ne pas abandonner les salariés de Rambervillers à la seule logique financière.

Matussière : Christian Poncelet pousse à la roue

Matussière veut-il vendre ? Le président du Sénat en doute et exhorte le repreneur allemand à formuler une offre d'achat globale du site de Rambervillers.

La splendeur dorée et un peu glaciale du Palais du Luxembourg, mardi soir. Un peu avant 21h30, Christian Poncelet, souriant et préoccupé, arrive au rendez-vous avec le papetier allemand, M. Braun, et son avocat, M. Epp : « Alors, comment vont nos affaires ? » Embarras du patron de la PME allemande Lenk, Lutz W. Braun, candidat au rachat de l'usine de Rambervillers : « Ça n'a pas évolué dans le sens qu'on souhaitait. On voulait aboutir à un résultat aujourd'hui, car le 8 mai, nous avons une réunion avec nos associés ! »

La nouvelle déçoit le président du Sénat sans vraiment le surprendre : « L'affaire a changé de régime. Maintenant qu'il y a un administrateur judiciaire, est-ce que ça change quelque chose ? »

« Le temps presse »
Non, les relations n'ont pas vraiment évolué : « Henri Kreitmann, le PDG de Matussière, garde une certaine liberté de négocier, dit l'avocat d'affaires. Au départ, on est parti du principe qu'on pourrait disposer de l'intégralité de l'outil de production, avec l'embauche de 100 personnes et 3 millions d'euros d'investissement. Une somme qui ne permet pas de maintenir un fort prix d'achat. Aujourd'hui, on nous demande ce que nous voulons prendre au sein de l'outil de production et ce que nous laissons ! Ce n'est pas dans l'esprit initial. En même temps, le facteur temps semble avoir échappé à l'administrateur judiciaire : il faut que les machines tournent, il y a urgence. »

Christian Poncelet : « Rédigez une proposition concrète pour un achat global de l'ensemble mobilier et immobilier, et pour le rachat du stock de produits transformés et de matière première ! Dites que vous reprenez l'usine en l'état, que vous embauchez 100 à 120 personnes, et que vous êtes prêts à discuter. L'administrateur judiciaire doit défendre les intérêts des créanciers. De plus, comme il y a démarrage d'une activité neuve, l'Etat peut intervenir pour donner des primes à la création d'emploi. »

L'argument du social

M. Braun va adresser une lettre en ce sens au tribunal de commerce de Grenoble, dans l'Isère, où se trouve le siège du groupe Matussière. Avec une échéance pour son offre : le 31 mai.

L'industriel allemand se dit convaincu de « la bonne volonté de tous les partenaires ». Mais celle-ci suffira-t-elle ? Maintenant que le plan social est financé par l'Etat, que la plupart des salariés ont reçu leur lettre de licenciement, les machines pourraient-elles être vendues en Inde ou au Pakistan ? Visiblement piqué au vif, Christian Poncelet soulève une contradiction : « Le groupe Matussière affirme mettre le social en avant : s'il n'y a pas de repreneur, si le nombre de licenciements est important, est-ce du social ? Je ne me laisserai pas faire ! »

Jean-Paul VANNSON

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