13 h hier devant l'entreprise Matussière et Forest. 450
personnes environ ont rallié le point de départ de la
marche prévue dans les rues de Rambervillers. Jean-Charles
Capdet, délégué CGT du personnel, se charge d'organiser
le convoi. En quelques minutes tout est en place. Les
enfants mèneront le cortège. Les salariés, les délégations
syndicales, les familles, les sympathisants, bref, tous ceux
qui sont touchés de près ou de loin par cette catastrophe,
leurs emboîteront le pas.
Les enfants montrent donc la voie à suivre sans dire un
mot. Les pancartes fabriquées pour la triste circonstance
alourdissent encore un peu plus l'atmosphère. Dur à vivre.
De l'intérieur, comme de l'extérieur. Quelques exemples
parmi d'autres véhiculés par des gosses qui n'ont rien
demandé. Mais, comme leurs parents, ils ont pris la déferlante
en pleine face. « Moi et mes deux soeurs, on veut
garder notre maison, laissez papa travailler » ou
« Non au passé, nous c'est l'avenir » ou encore
« Du boulot pour nos parents ».
Visages graves, coeurs serrés, les mamans, les papas,
qui ont appris que leur entreprise ne voulait plus d'eux,
suivent le mouvement, sans rien dire. A l'évidence tout le
monde est encore sous le choc. Pour autant, tous veulent démontrer
que le site doit continuer à vivre.
Les machines tournent
Jean-Charles Capdet ne cesse de le répéter, par mégaphone
interposé. « Notre usine est viable, on va le prouver
même si aujourd'hui Rambervillers est en deuil. Cette décision
de fermer le site est inadmissible et inquiétante. A terme,
c'est la ville qui va fermer et pas seulement Matussière et
Forest. Mais, on va se battre. Et avec le soutien de tous,
on y arrivera »
Alors que la foule a doublé de volume, les rues de la
cité s'animent quelque peu. Les gens s'installent aux fenêtres
ou soutiennent du regard le ouvriers. Les commerçants ont
fermé boutique de 13 à 14 h. Eux aussi ont parfaitement
compris que le commerce local prendrait une nouvelle claque
si d'aventure la mort annoncée de « M et F » se
confirmait.
Une hypothèse que personne ne veut envisager. Si les
gens placés en première ligne, c'est-à-dire ceux qui
vivent avec un couperet au-dessus de la tête depuis
quelques jours, n'ont rien appris de nouveau après ces deux
heures de marche, ils auront au moins eu la satisfaction de
voir que la mobilisation avait été importante. Des employés
de la cristallerie de Baccarat étaient notamment venus
apporter leur concours. « En continuant à faire
fonctionner l'entreprise, ils montrent leur détermination »
confiait l'un d'eux.
Effectivement, à quelques centaines de mètres de la
mairie, 25 employés du site sont occupés à faire tourner
les machines. « Ils auraient préféré être avec
nous » concluait Jean-Charles Capdet. « Mais,
notre préoccupation première est de tout mettre en oeuvre
pour trouver un repreneur, on n'est pas là pour saboter le
matériel. Aujourd'hui, on a été parfaitement soutenu, ça
va nous aider pour la suite ».