Article paru dans l'Est
Républicain en page Vosges le 27 février 2004 Une conduite de Grenoble pour les deux Pdg. Photos Claude ROUX La colère blanche des Matussière Oh, certes, toutes les insultes et noms d'oiseau ont volé, pendant de
longues minutes, et ils n'en menaient pas large, MM Kreitmann, Pdg de la
holding coiffant le groupe Matussière et Forest dont M. Aubertel est le
Pdg.
Dès leur arrivée à 8 h 30, l'accueil avait déjà été tendu. Les
salariés avaient exigé que les deux cadres dirigeants rencontrent
d'abord les délégués des salariés avant les cadres et la maîtrise,
une demande rapidement acceptée. Pendant les entretiens, dans une salle
de l'usine, tandis que les uns se réchauffaient devant le feu de palette,
les autres entreprenaient d'enrober de plastique d'emballage les voitures
des arrivants, ainsi que celle du directeur du site, Eric Royal. Toute
l'usine était en grève depuis 8 h et le resterait jusqu'à 20 h.
« A l'eau ! » Et les salariés n'en sauront pas plus. Maigre bilan qui a le don de
rapidement exaspérer des troupes mobilisées depuis maintenant près de
deux mois, le 6 janvier, quand l'annonce de la fermeture du site a été
annoncée par la direction.
Et à 10 h 45, à la sortie de la seconde réunion, le ton est
brutalement monté. « Terminator ! Pourris ! Escrocs !
Bandits ! Fossoyeurs ! ». Un échantillon. Le reste ne
peut être écrit. Jusqu'à un « Foutez-les à l'eau ! »,
heureusement non suivi d'effet, sauf l'effet boules de neige... Les
ouvriers avaient entre-temps amené la voiture présidentielle dûment
emballée, sur et attachée à un chariot élévateur. Les deux hommes
entreprirent de dépiauter la petite voiture d'une main malhabile, l'autre
serrant la serviette, d'un air mi-exaspéré, mi-dégoûté, mais tout de
même courageux dans la tempête traversée d'une grêle de lazzis et de
quolibets. Quand ce fut fait, évidemment, les clés du chariot avaient été
perdues, et les deux hommes, cravate au vent dans l'air gelé entreprirent
de rallier Rambervillers à pied, tandis que les salariés leur faisaient
une conduite de Grenoble d'anthologie, en leur cornant des klaxons de
camionneurs aux oreilles. Au milieu du gué, Gérard Keller, maire,
descendit de son coupé et invita les deux chefs d'entreprise à venir
expliquer la situation dans son bureau.
A la mairie Et ce fut tout. La même chose devait être répétée l'après-midi au
secrétaire général de la préfecture, Yvon Alain et au directeur du
Travail Frank Plouviez, puis au Capev. Mais la troupe des salariés, menée
par la CFDT et la CGT qui l'avait contenue tant bien que mal toute la
journée était moins nombreuse. « Vous nous avez mis dans la m...,
et vous allez nous laisser dedans », avait crié le matin un des
salariés. « Tout ce qui nous reste, c'est la colère de l'ouvrier ! »
avait conclu un autre.
Ce message-là est passé. Guillaume MAZEAUD . |
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