Article paru dans l'Est Républicain en page Vosges du 15 Février 2004
Cinq cent cinquante personnes de tous horizons
et une manifestation bon enfant.

 Photos Vincent HOPé

Le cri du papier

Début janvier, la nouvelle tombe comme une bombe. L'usine Matussière et Forest de Rambervillers va fermer ! Stupeur et consternation, tant cette unité semble alors à l'abri d'une mauvaise surprise, tant par la modernité de son outil que par son savoir-faire plus que séculaire. Depuis lors, l'entreprise n'a jamais cessé de tourner. Les 205 salariés sont restés à leur poste de travail. Ils se sont relayés pour garder l'usine, empêcher les machines de partir. Au fil des semaines, sept candidats à la reprise se sont succédé, dont certains, réputés très sérieux, issus du monde papetier. Economiquement, souligne le directeur, Eric Royal, la période de crise est la plus propice à un rachat. Ce qui correspond exactement à l'attente du personnel : il souhaite que l'unité de Rambervillers quitte le groupe Matussière. Vendredi, pour la première fois, la direction a entériné ce voeu en acceptant le principe de la vente de cette unité vosgienne, sans recourir pour autant à une mise à prix exorbitante.

Avec les politiques
Sous cet aspect, le livre III, qui recouvre le plan social, se présente sous un jour favorable. Mais il n'en est pas de même en ce qui concerne les mesures prévues à ce jour pour les préretraites ou les départs anticipés, soulignent syndicats et élus, à l'instar de Jean-Pierre Moinaux. Derrière les banderoles CGT et CFDT, le conseiller régional, tête de liste vosgienne du PS, défilait hier en tête de la manifestation, aux côtés de Daniel Gremillet, son homologue de l'UMP, ainsi que, durant quelques minutes, de Michel Heinrich, député maire d'Epinal.

Une mobilisation des partis peu surprenante en cette période préélectorale. Ce qui n'est pas forcément pour déplaire à des salariés décidés à faire flèche de tout bois pour défendre leur emploi. Mardi, lors du groupe CCE à Lyon, ils ont obtenu un répit de trois semaines pour la mise en oeuvre du plan social, repoussée fin mars.

Un cortège solidaire
C'est dans ce contexte un peu moins tendu que les salariés ont défilé hier à Epinal, un mois et demi après l'annonce de la fermeture. Accompagnés de leur famille, de syndicalistes CGT et CFDT vosgiens, mais aussi des usines Matussière de Raon-l'Etape, de Turckheim, de la Drôme et de l'Ariège, d'élus de Rambervillers, et de rares maires du canton, ils ont formé dès 14 h 30 un cortège bon enfant, sous un soleil complice et avec force sifflets, trompes et trompettes. Devant la préfecture, ils ont déposé boîtes de lait et rubans de papier. Devant la mairie, ils ont clamé leur volonté de vivre et travailler dans une usine remarquable à maints égards. A 16 h, à leur retour place Foch, la préfecture était déjà délivrée de ses liens de papier, et la CGT appelait à une dispersion dans le calme. Une CGT majoritaire dans l'entreprise rambuvetaise, mais qui avait associé le sigle de la CFDT dans la banderole de tête du cortège : « Tetra-pack et papiers = un savoir-faire ».

Jean-Paul VANNSON

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